Le 27 octobre dernier Arte, dans une émission intitulée "Vade Retro
Satanas", avait mis en présence entre autres, le P. Bellot, l'exorciste
du diocèse de Paris, et Dom Amorth, l'exorciste du diocèse de Rome. On avait
presque jusqu'à la caricature, en la personne du père Bellot, le type de
l'exorciste qui, comme la majorité de ses confrères, se moque de la croyance
au démon qui, pour ce prêtre désinvolte, n'est qu'un symbole abstrait du mal
et renvoie donc ceux qui s'adressent à lui aux différents psy : psychiatres,
psychologues, psychanalystes... et Dom Amorth pour qui il est nécessaire de
distinguer ce qui vient du démon et ce qui est la conséquence de certaines
maladies, physiques ou mentales.
Le dernier livre de Dom Amorth Exorcisme et psychiatrie
(1),
explique justement avec beaucoup de clarté les critères qui permettent de
distinguer une maladie d'un phénomène maléfique, ce qui n'empêche pas que
certains maux organiques, en particulier des tumeurs au cerveau ou des kystes,
peuvent être guéris par des exorcismes car "le démon a aussi le
pouvoir de provoquer des maladies" (p.123). Alors qu'en France, il n'y a
que cinq exorcistes sur 110 qui pratiquent l'exorcisme (les autres se contentent
d'écouter le patient et de l'envoyer chez le psychiatre), Dom Amorth a
pratiqué depuis 1986, plus de 60 000 exorcismes qui se concluent par des
guérisons, parfois après des années ou au moins des améliorations. Pour
remédier à la solitude des exorcistes qui ne sont pas formés à exercer leur
salutaire ministère, il a fondé en 1994 et il la préside, l'"Association
internationale des exorcistes" composée d'une centaine d'exorcistes du
monde entier qui peuvent confronter leur expérience. Et pourtant, alors que les
maladies sont à peu près les mêmes d'un malade à l'autre, il n'y a pas deux
exorcismes identiques, car il n'y a pas deux phénomènes semblables de
possession.
Dom Amorth commence son livre par un bref historique des exorcismes en rappelant
que la Bible parle du démon plus de mille fois et le Nouveau Testament 568 fois
et que le Christ, contrairement à ce que l'on raconte maintenant, distinguait
les malades qu'il guérissait et les possédés qu'il délivrait. Les causes de
la possession peuvent venir d'une permission divine pour purifier l'âme ou
libérer une autre âme (comme le père Surin qui a pris en lui le démon des
religieuses de Loudun et les a ainsi libérées) mais aussi, et c'est la plupart du temps le cas, d'une vie éloignée de Dieu (avortement, immoralités...)
et rattachée parfois involontairement et par ignorance à Satan par
l'occultisme, le spiritisme, la magie, la voyance, la nécromancie ou évocation
des morts, certaines pratiques indiennes, tibétaines, kabbalistes, certains
aspects de la franc-maçonnerie et du communisme ainsi que, volontairement, par
l'adhésion à des sectes sataniques et à Satan lui-même (pactes avec Satan),
afin d'obtenir pouvoir, richesse et plaisir. "Mais vu que le démon ne
peut faire que le mal et vouloir que le mal, à ses dons il ajoute toujours de
grandes souffrances. C'est pourquoi ceux qui demandent ses dons à Satan font
une mauvaise affaire : ils vivent un enfer sur cette terre et, s'ils ne se
convertissent pas, un autre enfer dans l'autre vie" (p.125).
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Différences entre maux naturels et
maléfiques
Dom Amorth recommande face à une maladie, un malaise, une angoisse
chronique, de consulter d'abord un médecin ou un psychiatre et c'est lorsque
les résultats sont nuls ou le contraire de ce qui était espéré qu'on peut
s'adresser à l'exorciste, le psychiatre ou l'exorciste pouvant d'ailleurs
collaborer et s'envoyer leurs patients. Pour être sûr d'avoir affaire à une
possession qui se caractérise souvent par une aversion envers tout ce qui est
sacré ainsi que par l'extraordinaire force et les connaissances suprahumaines que donne le démon (le possédé peut parler des langues inconnues de lui),
l'exorciste va d'abord procéder à un bref exorcisme. Cela lui permet
d'établir un diagnostic car "c'est seulement par l'exorcisme qu'on a la
certitude de se trouver ou non face à un cas d'origine maléfique"
(p.104). Dom Amorth, pour encourager le démon à quitter une personne, lui dit
un jour : "Tu paies, par une augmentation de peines éternelles, chaque
souffrance que tu provoques chez cette personne. Tu as tout intérêt à t'en
aller au plus tôt" et le démon lui répondit : "Mes peines me
sont complètement indifférentes ; il me suffit de faire souffrir cette
personne et de la détruire" (p. 120-121).
Pour se libérer du démon, la collaboration de la personne avec l'exorciste
est essentielle : elle doit rompre avec une vie de péché, se confesser,
communier, aller à la messe, avoir une vie unie à Dieu car "celui qui
délivre, c'est le Seigneur. Et l'on obtient cette aide si l'on prie et si l'on
supprime les obstacles éventuels à la grâce" (p.130). Dom Amorth
parle également des prières de délivrance pratiquées par le Renouveau, souvent
efficaces pour les problèmes mineurs. Il regrette la diminution et parfois
même l'absence des exorcismes dans le nouveau rituel du baptême et s'oppose au
nouveau rituel des exorcismes, approuvé par le Vatican en 2001 (mais Dom Amorth
a obtenu que les exorcistes qui le souhaitent puissent continuer à utiliser
l'ancien rituel, inchangé depuis 1614 et seul efficace d'après lui : il en
donne, à la fin de son livre les trois grandes prières). Dans l'ancien rituel
des exorcismes, la Sainte Trinité et la Sainte Vierge sont constamment
invoquées. Et chacun de nous peut dire la très belle prière donnée au P.
Cestac par la Sainte Vierge :
"Auguste Reine des Cieux, souveraine maîtresse des Anges, vous qui avez
reçu de Dieu le pouvoir et la mission d'écraser la tête de Satan, nous vous
le demandons humblement, envoyez vos légions saintes, pour que, sous vos
ordres, et par votre puissance, elles poursuivent les démons, les combattent
partout, répriment leur audace et les refoulent dans l'abîme. Qui est
comme Dieu, O bonne et tendre Mère vous serez toujours notre espérance et
notre salut. O divine Mère, envoyez les Saints Anges pour me défendre et
repousser loin de moi le cruel ennemi. Saints Anges et Archanges,
défendez-nous, gardez-nous.
Michèle REBOUL.
(1)Editions François-Xavier de Guilbert, 245 p. 20 €
Sur les exorcismes, voir aussi "La lutte contre le démon : les
exorcismes", Monde et Vie, n°598, 25 avril 1996 et le "nouveau
rituel de l'exorcisme : son efficacité", n°688, 6 septembre 2001

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